Aix-en-Provence, 26 mars 2025, n° 20/13029
L’éditeur est tenu à un effort de diffusion et de promotion impliquant à la fois la durée et l’absence de discontinuité.
En 2015 et 2016, un auteur avait conclu avec son éditeur deux contrat d’éditions des livres « Les fruits amers » et « Le glaive de Némésis ».
En 2017, l’auteur a mis son éditeur en demeure d’assurer l’exploitation permanente et suivie de ses œuvres ainsi que la publication de celles-ci au format numérique.
Cette mise en demeure n’ayant pas été suivie d’effet, il a notifié la résiliation de ces deux contrats d’édition.
Il a alors été assigné par l’éditeur afin d’indemnisation des préjudices résultant de la rupture unilatérale des contrats et du manquement de l’éditeur à ses obligations contractuelles.
Le Tribunal judiciaire de Marseille a estimé que la rupture unilatérale des contrats d’édition était fautive mais cette décision est ici infirmée par la Cour d’appel d’Aix-en-Provence.
L’éditeur admet un retard dans l’édition numérique des ouvrages mais contestait avoir été défaillant dans l’impression, la diffusion et la promotion de ses livres.
Il considère notamment avoir empli l’ensemble de ses obligations contractuelles en organisant des diffusions de mails pour informer les libraires, en faisant des communiqués de presse et de parution, en faisant appel à une agence de presse.
La Cour d’appel d’Aix-en-Provence rappelle les points suivants :
- Il appartient à l’éditeur se prévalant d’une résiliation fautive de démontrer que les conditions de la résiliation ne sont pas réunies ;
- La diffusion de l’ouvrage n’est possible qu’autant que l’éditeur prend toutes les dispositions nécessaires pour porter à la connaissance du public l’existence de l’œuvre et l’inciter par là-même à l’acquérir, de sorte que l’obligation de diffusion implique l’obligation d’assurer la promotion de l’œuvre ;
- L’effort de promotion dépend de la nature de l’œuvre et du chiffre d’affaires envisagé, ainsi que de la taille de la maison d’édition et de la notoriété de l’auteur, et il convient, pour apprécier si l’obligation de promotion a été respectée, de se reporter aux dispositions contractuelles.
En l’espèce, l’éditeur ne rapporte pas la preuve du respect de ses obligations dès lors notamment que les pièces produites sont antérieures au mois de juillet 2015, « alors que le caractère permanent de l’exploitation requise implique à la fois la durée et l’absence de discontinuité, et que la mise en demeure de l’auteur dénonce une absence de diffusion du livre « Les Fruits Amers » depuis juillet 2015, et une absence totale de diffusion pour le livre « Le Glaive de Némésis ».
En outre, l’éditeur ne démontre pas les actions de promotion qu’il aurait concrètement mises en œuvre : « En l’absence de tout document démontrant tant les actions de promotion qu’elle a concrètement mises en œuvre, que la permanence de l’exploitation au-delà du mois de juillet 2015, la Sas Les Editions Chum ne justifie pas avoir respecté son obligation de diffusion commerciale conformément aux usages de la profession, un tel manquement justifiant non seulement la résiliation du contrat, mais engageant également sa responsabilité contractuelle. »
La rupture des relations contractuelles n’est donc pas fautive et l’éditeur est débouté en appel de l’ensemble de ses demandes.
L’obligation d’exploitation permanente et suivie, ne peut se limiter à rendre l’ouvrage disponible dans les catalogues de l’éditeur ou sur commande, elle suppose un effort de promotion de l’œuvre, conformément aux usages professionnels et impliquant à la fois la durée et l’absence de discontinuité.