Olivier Ledru, avocat au barreau de Paris

20Sep

L’IA n’est pas un auteur au sens du droit du copyright américain

United States District Court, District of Columbia – 18 août 2023 – Stephen THALER, Plaintiff, v. Shira PERLMUTTER, Register of Copyrights and Director of the United States Copyright Office (No. 22-1564) – gov.uscourts.dcd.243956.24.0_2.pdf (courtlistener.com)

Cette décision refusant la qualité d’auteur à une IA générative concerne une image mais nul doute qu’elle puisse être transposée à toutes sortes de créations (textes, chansons, musiques, films …).

Monsieur Stephen THALER (Imagination Engines Incorporated) a conçu une IA générative (« Creativity Machine ») qu’il a utilisé pour générer, sans intervention humaine,  une image intitulée « A Recent Entrance to Paradise » :

Dans sa demande d’enregistrement, Monsieur THALER avait mentionné l’IA générative (« Creativity Machine ») comme seule auteur de l’image à l’exclusion de toute intervention humaine.

Le Copyright Office, relevant que Monsieur THALER indiquait dans sa demande n’avoir joué aucun rôle dans l’utilisation du système génératif, a refusé de faire droit à sa demande d’enregistrement après avoir constaté l’absence d’une « paternité » humaine nécessaire à la revendication du droit d’auteur.

Devant ce refus, Monsieur THALER a saisi le Tribunal (District of Columbia) qui a, à son tour, rejeté sa requête confirmant ainsi la nécessite d’une intervention humaine pour qu’une œuvre puisse accéder à la protection du copyright (« United States copyright law protects only works of human creation »).

Monsieur THALER soutenait que la loi sur le copyright (Copyright Act) accorde la protection à toute œuvre originale (« original works of authorship ») sans définir expressément la notion d’auteur comme se référant exclusivement à un être humain et que dès lors, cette notion englobe, dans son sens courant et usuel, les IA génératives.

Le Tribunal rejette cette interprétation et indique que la notion d’auteur suppose l’initiative et l’intervention d’un d’agent capable d’un travail intellectuel, créatif ou artistique et donc nécessairement d’un être humain (« By its plain text, the 1976 Act thus requires a copyrightable work to have an originator with the capacity for intellectual, creative, or artistic labor. Must that originator be a human being to claim copyright protection ? The answer is yes”).

Selon le Tribunal, en l’absence de toute « paternité humaine » (« Lacks of human authorship »), une œuvre entièrement générée par une IA (« Artificial Intelligence generated artwork ») ne peut donc pas accéder à la protection du copyright.

L’intervention humaine reste donc une exigence fondamentale du droit d’auteur.

Mais cette décision ne concerne que les œuvres entièrement et exclusivement générées par IA sans aucune intervention humaine.

En cas d’interaction entre l’humain et l’IA, se pose donc nécessairement la question du degré d’implication suffisant de l’humain aux côtés de l’IA pour reconnaitre à l’œuvre une « paternité humaine » et donc lui accorder la protection du droit d’auteur. Se pose également et inévitablement la question de l’originalité d’une œuvre qui aura été générée par une IA générative elle-même entrainée et nourrie d’œuvres préexistantes.